Les militants et militantes de l’UQAM doivent prendre conscience de leur force, car ailleurs le mouvement étudiant est en décrépitude. Seule l’UQAM peut démarrer un mouvement de grève nationale. La grève d’une semaine nous a démontré que la crise financière et la réunion des forces progressistes au sein des associations qui formaient jadis l’AGEsshalcUQAM nous offrent l’opportunité de construire quelque chose sur nos propres bases. L’ultime chance de renverser la vapeur repose sur nos épaules.
L’ASSÉ n’a pas les reins assez solides pour réaligner à temps son défunt projet de grève. Elle a refusé d’entamer une nouvelle campagne à l’hiver de peur de perdre des éléments dans la course. Sa position actuelle est loufoque. L’ASSÉ laisse le choix entre les mains de ses associations membres, elle n’assure donc en rien sa mission de rallier les troupes derrière un mot d’ordre commun. L’absence de stratégie est visible. Le prochain congrès, prévu pour mi-février, en est une preuve parce que beaucoup trop tard.
L’idée est de faire exactement l’inverse qui fut tenté à la dernière session. Au lieu de compter sur une amorce nationale, nous pensons qu’il s’agit de rallier d’abord le bastion militant que représente l’UQAM par l’adoption d’une stratégie unitaire. Pour ce faire, nous devons proposer des revendications qui sauront plaire à toutes les assemblées générales sans trahir nos principes fondateurs. La plateforme en annexe(1) à ce texte constitue une alternative à l’idéologie maximaliste qui a caractérisé la dernière tentative de grève.
Coalition UQAM
Les dernières assemblées générales facultaires ont eu des sursauts d’émotion due à l’atmosphère de fête de la grève interne. Elles ont décidé de faire des assemblées générales de grève dès la rentrée. Il est suicidaire de construire une contestation précoce sans se donner les moyens de rejoindre les institutions collégiales à brève échéance. Une grève en janvier est une mauvaise option si nous acceptons a priori l’hypothèse de son expansion nationale. C’est pourquoi les assemblées générales prévues en janvier devraient plutôt servir de tremplin à l’organisation d’une coalition uqamienne qui pourrait résoudre les principales contradictions observées lors de la précédente campagne nationale et celles de la grève à l’UQAM(2).
Nous envisageons la création d’une coalition UQAM dans les plus brefs délais. Les associations étudiantes doivent formaliser leur union politique à l’aide d’une structure démocratique. Des positions de principe en faveur d’une telle coalition devraient être proposées lors des premières assemblées facultaires. Un premier congrès se doit d’être organisé avant le mois de février où les différentes associations facultaires discuteront à voix égal des moyens à mettre en œuvre pour mener à terme notre projet(3). Il doit déterminer les dates des assemblées générales de grève des facultaires, toutes dans une même semaine et dans un ordre stratégique(4). De cette rencontre doit obligatoirement ressortir une proposition maîtresse comprenant un plan d’action d’envergure, qui sera ensuite apportée dans toutes les assemblées générales facultaires.
Il faut que les deuxièmes assemblées générales des facultaires formalisent l’existence de la coalition en déterminant la date du congrès de fondation et en adoptant les modalités de la grève. Toutes les associations facultaires peuvent - et doivent - commencer la grève simultanément, c’est-à-dire le lendemain de ce dit congrès. Tout ça est bien réaliste. Les tergiversations au sujet du momentum, de l’escalade des moyens de pression ou des revendications idéalistes se heurteront à un plan béton. Les éléments incertains, troubles ou réactionnaires seront forcés de prendre position.
Notre stratégie politique
La qualité de notre discours est importante. Il faut réussir à cibler aussi bien l’enjeu local, c’est-à-dire le plan de redressement, que les enjeux nationaux, à savoir le dégel et le sous-financement. Cette entreprise est vouée à l’échec dans le cadre d’une lutte strictement uqamienne. Un combat à petite échelle ne peut renverser le contexte politique de droite. Notre argument secondaire est tiré des leçons de la grève étudiante 2005, où six semaines de grève nationale ont été requises pour faire fléchir le même gouvernement sur un dossier de moindre importance que le dégel ou le sous-financement.
Selon cette perspective, la nécessité absolue de la coalition sera d’étendre la grève. Une fois celle-ci entamée, notre priorité sera d’apporter du soutien aux autres associations étudiantes susceptibles de nous rejoindre dans les deux semaines. Nous envisageons une participation des associations universitaires, où les frais afférents explosent en raison du sous-financement chronique. Par ce travail d’expansion, nous pourrons réellement augmenter notre rapport de force et potentiellement remporter la victoire.
Ultimement, cet appel à la généralisation du mouvement sur des bases clairement nationales vise à réunir nos forces autour d'une coalition élargie de l'ASSÉ. Par ses principes politiques et les moyens d'action qu'elle privilégie, elle représente le pôle organisationnel de choix face au gouvernement, que ce soit en temps de grève, avant ou après. Toutefois, il n’est pas exclut que le mouvement national meurt illico. Ce scénario justifie d’autant plus la création d’une coalition uqamienne, qui doit favoriser la poursuite de la grève locale sur des bases solides quoiqu’il arrive, quitte à réduire ses ambitions a posteriori. De toute façon, compte tenue l’incertitude au national, il nous faudra bien mettre sur pied un comité de négociation et un comité médiatique communs entre facultaires, essentiels à une grève efficace. Quelque soit l’orientation que nous prendrons, la formation d’une coalition UQAM est utile.
Conclusion
Notre rôle est de trouver les termes justes afin de parvenir à rassembler les masses étudiantes, un rôle que l’ASSÉ n’a pas su assumer à la dernière session. Mieux vaut une grève aux revendications modérées qu’un discours en rupture sans grève. En développant un langage de gauche adapté à la réalité étudiante et un plan d’action à la fois calibré sur nos moyens et audacieux, les associations les plus combatives s’engageront avec nous dans la bataille. Radicaliser notre lutte passe d’abord par la construction d’un mouvement populaire qui s’exprime dans la rue.
La coalition UQAM peut servir de levier à une grève nationale dans la mesure où la crise financière de notre université n’est pas un phénomène spécifique. Elle est le résultat d’une politique néolibérale appliquée dans toutes les écoles des sociétés industrielles. Le marché impose ses intérêts sur le public. Les transformations de l’école capitaliste nous obligent à construire des organisations définitivement plus puissantes. La coalition UQAM est un aperçu des fusions syndicales nécessaires à une véritable résistance anticapitaliste. La réussite de cette unité politique entre les organisations réunissant les différents domaines d’étude jugés improductifs pour le système peut ébranler les forces de droite, si elle se prolonge dans le temps. Avec une telle coalition, il n’y aura qu’un pas à faire, suite à la grève, pour reconstituer l’AGEsshalcUQAM.
ANNEXE (1)
1- Vers la gratuité scolaire : contre toute augmentation des frais de scolarité et abolition de tous les autres frais (afférents, technologiques, etc.);
2- Abolition des plans de redressement à l’UQAM. Réinvestissement massif en éducation pour une amélioration des ressources et des services (investissement dans les laboratoires et les bibliothèques, embauche de profs, d’employé-e-s professionnel-le-s et de soutien) dans une perspective d’éducation de qualité, libre de l’intervention du privé;
3- Mise en place d’un service de garde public, accessible et flexible dans tous les milieux d’étude postsecondaires, dans le but d’assurer une conciliation études-famille.
(2)Un problème central est bien entendu les conseils de grève. Ils sont l’expression pure des oppositions qui règnent dans un contexte de lutte donné. Or, malgré cela, nous pensons que les problèmes engendrés par leur pratique valent mieux que le dirigisme des représentant-e-s ou la pratique isolée, c’est-à-dire facultaire, de nos démocraties. Nous pensons que l’unité uqamienne passe par la formation d’un conseil de grève unique dépendant de la coalition tant sur sa forme que sur son contenu.
Les gens réfractaires aux conseils de grève le sont généralement parce qu’ils et elles jugent cette instance antidémocratique. Nous pensons que les conseils doivent être redevables aux volontés démocratiques des différentes associations exprimées à travers la coalition. Pour régler ce problème, une solution s’impose : formaliser leur existence dans nos assemblées générales et préciser l’étendu de leur pouvoir.
L’autre problème des conseils de grève est son déroulement chaotique. Nous proposons que soit créé un Comité de suivi qui aura comme fonction d’assurer la cohérence du conseil de grève au quotidien. Celui-ci serait formé d’un-e exécutant-e de chaque association facultaire membre de la coalition, et il lui serait redevable. Les tâches du Comité de suivi seraient de proposer un ordre du jour à chaque conseil de grève, en rédiger les procès-verbaux et transmettre l’ensemble des informations aux différentes instances de la coalition.
(3)Plateforme de revendications, structure décisionnelle (congrès, conseils de grève, comités de travail), plan d’action, calendrier des assemblées de grève, question financière, etc.
(4)
14 au 21 janvier : 1ères assemblées générales, positions de principes pour une coalition
26 et 27 janvier : 1ère rencontre pour former une coalition (voir note de bas de page précédente)
4 au 8 février : Assemblées générales de grève, adoption de la coalition et des modalités
9 et 10 février : Congrès de fondation de la coalition, création des comités, élaboration d’une stratégie, expansion de la grève
11 février : Déclenchement de la grève
11 au 25 février : Mobilisation externe, multiplication des assemblées générales de grève
16 au 17 février : Congrès de l’ASSÉ, appel à la grève nationale, coalition nationale
Andréann Cossette Viau
Jean-Christophe Gascon
Pierre-Luc Junet
Christian Pépin
David Simard