Forums de l'ASSÉ

Bonjour.
Saviez-vous que le Québec traverses présentement une période de pénurie quant aux enseignants au secondaire? Saviez-vous qu'il existe pourtant un nombre assez élevé de personnes, spécialistes dans leur domaine, qui aimeraient pourtant enseigner mais ne peuvent le faire puisque c'est interdit par la loi?

En effet, malgré leur maitrise en littérature, en mathématique, en anthropologie, ces personnes ne peuvent enseigner le français, les mathématiques et l'ECR puisqu'elles ne possèdent pas de brevet de maitre.

J'aimerais pouvoir enseigner un jour. Je crois que serais une bonne enseignante. Ma grand-mère enseignait dans les écoles de rangs, à des groupes de 30, et jamais elle n'a suivi de cours de pédagogie tels que nous les connaissons aujourd'hui. Parce qu'on les évaluait sur d'autres critères, et on s'assurait de vérifier qu'elles avaient bet et bien le talent pour pratiquer l'enseignement. Et le coeur pour le faire. J'ai quelques amies qui étudient au BES et elles me disent toutes que c'est l'horreur. La moitié des gens ne sont là que pour avoir un métier. Plusieurs filles disent qu'elles voulaient aller en éducation à la garderie, mais qu'enseigner est plus payant.

Et après on se questionne à savoir pourquoi l'éducation est de moins en moins valorisée dans la société québécoise? J'en connais qui étudient le français qui se fichent complètement de la littérature. Comment pourraient-ils alors transmettre la passion des lettres à leurs élèves si eux-mêmes sont dégoûtés par ça? Je ne dis pas que c'est le cas de la majorité des aspirants enseignants. Seulement, on ne peut nier que c'est une problématique présente dans ces départements. De plus, la composition d'un baccalauréat en enseignement fait en sorte que l'on y étudiera quasiment plus la pédagogie que la matière enseignée en tant que telle. Plusieurs seront finalement bien ignorants lorsqu'ils arriveront devant une classe. Et ils devraient s'y faire respecter?

Je crois qu'il y a des personnes faites pour enseigner, d'autres pas, et que les cours de pédagogie y changent bien peu de choses. Les meilleurs professeurs que j'ai eu au secondaire avaient fait un baccalauréat en leur matière et avaient été obligés de se taper un an de pédagogie avant d'enseigner. Ils ont tous dit que cette année avait été une perte de temps. Parce quand on a étudié si longtemps et qu'on aspire à l'enseignement, on a souvent la personnalité assez développé pour mener une classe. Au secondaire. (Je comprends que d'enseigner au primaire nécessite certaines méthodes d'apprentissage propres aux enfants)

Je ne crois pas que les baccalauréats en enseignement devraient disparaitre. Je crois seulement que de permettre à d'autres gens, parfois plus scolarisés, d'enseigner, diversifierait l'éducation et lui ajouterait une certaine profondeur. Cela pourrait aussi permettre de revaloriser les lettres, la culture et les arts puisque les personnes chargées de les transmettre seraient elles-mêmes des passionnées. De par cette passion, ce sérieux et la qualité des connaissances possédées par l'enseignant, le respect des élèves pourrait être obtenu, malgré le manque de cours de pédagogie.

Les comissions scolaires ont déjà proposé cette solution pour combler la pénurie d'enseignants mais le gouvernement brette.

«Cela fait partie des revendications de la Fédération des commissions scolaires auprès du gouvernement. On aimerait avoir plus d'ouverture et de souplesse à ce sujet. Non seulement cela nous permettrait de combler les postes, mais cela nous permettrait aussi de s'assurer de la qualité de l'enseignement. Vaut-il mieux en classe un enseignant qui possède sa matière, les maths par exemple, mais qui n'a pas de brevet, ou un enseignant avec un brevet, mais qui maîtrise moins bien la matière?»

Présentement, la dérogation du ministère est accordée de façon temporaire et ne peut devenir permanente que si l'enseignant complète son baccalauréat en formation des maîtres. «On pourrait peut-être créer une licence en pédagogie d'une durée d'un an et que la personne pourrait suivre tout en continuant à enseigner.»

Ceci ne se veut pas un bashâge sur les facultés d'éducation.

Il me semble que je devrais pouvoir enseigner la culture et l'éthique religieuse à la fin de mon baccalauréat en anthropologie.

Parce qu'il me semble que je m'y connaitrai alors tout autant, sinon plus, que bien des gens qui donnent ce cours présentement.

Vous savez, je crois que c'est un dossier qui pourrait avancer si on mettait d'une quelconque façon plus de pression.

Ça permettrait aussi à nos diplômés de se trouver des emplois dans leur champ d'études.

Excellente réflexion.

Présentement, les lois sur l'enseignement au secondaire agissent comme une sorte de piège, et de deux façons: ceux qui font leurs études dans ce Bac sont "prisonniers" d'un seul métier, et cette profession est "prisonnière" d'un seul Bac.

Pour les universitaires qui aiment se diversifier dans la vie, et dont la recherche, l'écriture, le travail pratique ou l'avancement de leur disciplique pourrait intéresser, faire le Bac en enseignement ou toute une année de pédagogie a de quoi repousser définitivement. Les établissements secondaires se privent ainsi de grandes opportunités!! D'autre part, pour les profs au secondaire qui n'ont fait qu'un bac en enseignement, et qui sont peut-être sur le bord du burn out ou en pleine écoeurantite aigue, la sécurité d'emploi et les avantages sociaux que fournit ce poste, conjugué au fait qu'il leur manque de connaissences et d'expériences pour faire quoi que ce soit d'autre, a de quoi les faire rester là presque à contre-coeur.

Et c'est tout le système qui en souffre, au détriment des élèves.

Le Bac en enseignement secondaire est ainsi devenu un repaire de gens qui sont davantage intéressés à enseigner qu'à ce qu'ils auront à enseigner. La connaissence est souvent dévalorisée par les enseignants eux-même. J'ai une amie qui a fait ce Bac et elle n'en revenait pas à quel point la plupart était désintéressée de tout approfondissement de la connaissence, manquait de curiosité, d'intérêt, et de tout ce qui selon moi fait la vraie pédagogie. J'ai moi-même été un élève turbulent, mais quand je tombais sur un prof qui semblait s'intéresser à tout, qui avait des réponses à mes questions ou qui les cherchait au lieu de les rejeter du revers de la main en disant "c'est pas au programme", voilà qui me portait à le respecter.

Quelqu'un disait, «enseigner, ce n'est pas remplir des vases, mais allumer des feux». Eh bien il y a une sacrée bande d'éteignoirs dans les écoles secondaires actuellement.

Excellent sujet, et voilà une mesure qui serait à la fois très facile à faire et très profitable pour la société québécoise en entier. Je ne parle pas d'enlever quoi que ce soit aux personnes qui ont fait le bac par vocation ou pour avoir un métier sécur, mais juste au moins pour combler les pénuries!!

Moi je suis en science et j'ai une culture générale correcte. L'enseignement au secondaire pourrait m'intéresser, mais certainement pas pour en faire un plan de vie.

PanuRe

Et voilà! Comme bien d'autres, je ne peux m'imaginer moi non plus passer toute ma vie dans une école secondaire. Mais je crois que j'aurais tout de même quelques belles choses à y transmettre!

Avoir d'autres sortes de diplomés amènerait aussi sans doute plus d'esprit critique dans les cours. Après tout, c'est un peu le rôle de plusieurs formations en sciences sociales et en lettre.

J'ai vraiment l'impression que les autorités dévalorisent ces domaines d'études. Un collègue de travail, qui a deux bac et qui est en train de faire sa maitrise en études anciennes, n'a pas été accepté comme correcteur d'examen au MELS parce qu'il n'avait pas les bons diplômes. Ils cherchaient des gens avec des diplômes en communication ou en enseignement. Pourtant, il avait déjà été correcteur à l'Université!

On s'arrange vraiment pour que les diplômés n'aient aucun emploi, j'ai l'impression, et restent dans leur tour d'ivoire, blasés.

Je suis un peu déçue, par contre, que ce sujet n'ait pas suscité plus de réactions.

Peut-être ne parle-t-il pas d'anticapitalisme ou de marches dans la rue, mais il me semble qu'il réfère à des mesures concrètes et sommes toutes assez faciles à faire entendre.

Vous résumez très bien le fond de ma pensée. Je discutais de cette situation très néfaste sur le long terme avec une amie. Selon-moi, la qualité d'un enseignant est bien plus déterminée par ses aptitudes personnelles que par le fait qu'il ait fait son bac en "enseignement du Français au secondaire" plutôt que d'avoir un bac en études littéraires.