Armin Arefi
La Presse
Collaboration spéciale
Téhéran
À quelques jours de la journée mondiale de la femme, 33 militantes féministes iraniennes ont été arrêtées dimanche devant le Tribunal de la Révolution de Téhéran. Elles protestaient contre la tenue du procès de cinq de leurs consoeurs, arrêtées en juin dans les mêmes circonstances.
Sur le coup de 10 h, alors qu'une soixantaine d'entre elles manifestaient dans la rue, des membres de l'armée et des agents en civil se sont précipités sur elles, les ont rouées de coups et les ont embarquées dans des bus en direction de la prison politique d'Evin.
Selon les autorités, une poignée de manifestantes « semaient le trouble en face du Tribunal », ainsi que le rapportait le quotidien réformateur Etemad Melli. Les femmes ont été arrêtées en vertu d'un article de la Constitution iranienne qui stipule que « deux personnes ou plus menaçant la sécurité intérieure ou extérieure du pays risquent deux à cinq ans de prison ».« Comment un rassemblement de femmes peut-il être un danger pour la nation? » s'interroge Homa Mazda, militante de 24 ans qui était présente à la manifestation. Selon Nassim Sotoudeh, avocate et militante, le rassemblement était pacifique et donc légal. « Notre action n'a qu'une base sociale, pas politique ». Parmi les femmes arrêtées, une avocate, de nombreux journalistes et des militantes d'à peine 20 ans, ayant pour la plupart des antécédents avec les autorités.
« Il est clair qu'il existe un lien entre leur arrestation et la journée du 8 mars. On a voulu nous faire peur pour jeudi », révèle Homa Mazda. À cette occasion, les militantes prévoyaient se rassembler devant le Parlement iranien. Il est certain que, sans leurs leaders, le rassemblement risque de tourner court.
Arrivées à la prison d'Evin, les femmes ont été transférées dans la section 209, sous le contrôle exclusif des Renseignements iraniens et composée de minuscules cellules individuelles, où elles sont « interrogées » depuis.
Hier, le quotidien conservateur Keyhan a annoncé avoir vaincu « ceux qui luttaient pour faire chuter la République islamique ». Il a notamment accusé les militantes de recevoir des sommes importantes d'argent de la part des États-Unis et des Pays-Bas pour renverser le régime. Citée dans la presse, Farideh Gheyrat, avocate de plusieurs des militantes emprisonnées, répond : « Je suis prête à démissionner s'ils arrivent à prouver quoi que ce soit. En Iran, on vous attribue des liens avec l'étranger pour vous discréditer. »
Les autorités ont promis de libérer les femmes. Mais beaucoup d'entre elles craignent les conséquences de leur geste : elles pourraient perdre leur place à l'université, voire leur travail.
Un groupe de militantes cherchant à améliorer la condition des femmes a lancé en octobre une pétition intitulée « Le million de signatures », misant sur des personnalités et sur le bouche-à-oreille pour récolter un million d'avis favorables. Les avocates Shirin Ebadi, Prix Nobel de la paix 2003 et Nassim Sotoudeh, membres du barreau pour la défense des droits de l'homme, ont proposé de s'occuper de toutes les femmes signataires en cas de discrimination.
Pour Nassim Sotoudeh, « cette pétition, en voyageant de foyer en foyer, permet de familiariser les Iraniennes sur leurs droits légitimes. Mais nous demandons aussi l'aide des femmes du monde entier, sans qui nous échoueront ». Leurs activités ont déjà permis la quasi-disparition des peines de lapidation pour adultère. Néanmoins, la vie d'une Iranienne vaut toujours moitié moins que celle d'un homme, et l'âge de la majorité chez les femmes reste toujours bloqué à 9 ans contre 16 pour ces messieurs.
Source: http://www.cyberpresse.ca/article/20070 ... 32/CPMONDE
Adresse web de la pétition: http://www.meydaan.com/english/
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Fleurdelys