de banana le Dim Mar 02, 2008 10:51 am
Violaine Ballivy
La Presse
Le recteur de l'Université de Montréal est furieux contre la décision de Québec de limiter la hausse des frais afférents facturés aux étudiants. Luc Vinet qualifie le nouveau règlement de «loufoque et improvisé» et annonce que pour s'y conformer, l'université pourrait devoir couper certains services offerts aux étudiants.
L'Université de Montréal est dans une situation délicate depuis que la ministre de l'Éducation Michelle Courchesne a dévoilé, au milieu du mois de février, un règlement plafonnant entre 15$ et 50$ par an la hausse des frais exigés pour divers services non académiques. Quelques semaines avant cette annonce, l'Université de Montréal avait décidé d'aller de l'avant avec des majorations de cinq à 10 fois supérieures.
Elle comptait ainsi amasser près de 7 millions pour bonifier certains services aux étudiants Elle comptait ainsi amasser près de sept millions pour bonifier certains services aux étudiants et assurer la survie d'autres. Or, en vertu de la nouvelle législation, cette somme ne dépassera pas le million et demi, ce qui suffirait à peine à couvrir l'augmentation normale des coûts de système.
«Cet écart substantiel conduira nécessairement à des coupures assez dramatiques au niveau de l'encadrement des étudiants. Nous sommes extrêmement préoccupés par les conséquences que la mesure, telle qu'elle est présentée, engendrerait», a mis en garde Luc Vinet dans une entrevue exclusive à La Presse, sa première depuis la présentation du règlement ministériel.
Un exemple? «Cela pourrait nous obliger à cesser ou à réduire le service de paniers de Noël offerts aux étudiants dans une situation précaire, les programmes d'orientation avec les conseillers scolaires, l'accueil des étudiants handicapés ou l'accueil des étudiants internationaux, alors qu'on a un gouvernement qui nous incite justement à en accueillir davantage dans une perspective d'augmentation de l'immigration.»
D'autres services seront maintenus dans leur «situation d'indigence», a noté M. Vinet. «La liste d'attente du service de soutien psychologique est de quelques mois. On ne pourra que maintenir les choses dans un état inacceptable. (...) Malheureusement, de plus en plus d'étudiants en ont besoin.» Une situation qui n'est pas sans conséquence sur la persévérance scolaire, selon le recteur.
En décidant de réglementer les frais afférents, la ministre de l'Éducation a répondu à une demande formulée depuis longtemps par les étudiants. En effet, ces frais ont bondi de 300% depuis 1994, de sorte que le coût d'une année d'études universitaires à temps plein a crû de 20% malgré le gel des droits de scolarité décrété par Québec jusqu'en 2007. Et cela, de façon très variable d'un établissement à l'autre.
Luc Vinet reconnaît que la situation était problématique, mais déplore que le nouveau règlement cristallise les inégalités entre les établissements de la province. L'écart entre les trois universités anglophones, où les frais sont les plus élevés, et le réseau francophone se chiffrera toujours en centaines de dollars dans trois ans, malgré la formule dégressive choisie par Québec dans le but précis de réduire ces inégalités.
La ministre Courchesne aurait donc mieux fait, selon M. Vinet, de permettre à toutes les institutions de rejoindre la facture de la plus gourmande - McGill - en plus d'accorder une hausse annuelle correspondant au minimum au taux d'inflation. «La formule proposée est assez loufoque et improvisée. Impraticable. On aurait certainement pu en concevoir une autre.»
Au-delà de la vie étudiante, c'est aussi la qualité de l'enseignement qui sera touchée, ajoute le recteur. Certaines facultés ont notamment «besoin de charger des frais beaucoup plus élevés» - celle de droit, par exemple, afin de permettre aux étudiants de participer à divers concours internationaux de plaidoiries. «Je vois chaque année le fossé s'élargir entre les universités québécoises et celles du reste du Canada.»
Relations tendues avec les étudiants
L'Université de Montréal n'a pas encore précisé le sort qu'elle réserve à la facture des étudiants pour septembre. «Nous sommes encore en pourparlers avec le Ministère et les étudiants pour trouver une issue», a dit M. Vinet. Le règlement prévoit en effet qu'une université peut dépasser les limites fixées à condition d'obtenir le feu vert de ses étudiants. Or, les relations sont pour le moins tendues entre les deux parties sur le campus du mont Royal.
À la mi-février, l'administration a envoyé une mise en demeure à la Fédération des associations étudiantes du campus de l'Université de Montréal (FAECUM) pour qu'elle cesse la distribution d'un dépliant qui dénonçait la hausse des frais en parodiant des slogans officiels de l'institution. «Ce guide vous offre une visite de l'université francophone où les étudiants déboursent le plus pour leurs études dans tout le Québec», y lisait-on notamment. Ou encore: «L'avenir commence ailleurs.» Le tout accompagné des coordonnées d'autres universités québécoises et canadiennes où les collégiens étaient susceptibles de trouver de «meilleures perspectives d'avenir».
Le dépliant était distribué à un moment choisi avec soin: pendant une journée portes ouvertes destinée justement à convaincre les collégiens de s'inscrire à l'Université de Montréal en septembre. La présidente de la FAECUM, Julie Bouchard, a qualifié la mise en demeure de «mesure complètement exagérée. Nos actions ont toujours été pacifistes.»
«Le dépliant était très bien fait. En couleur, avec des photos et les mêmes polices de caractères que celles employées pour les communications officielles. Il a pu semer la confusion chez certains parents», a justifié Sophie Langlois, porte-parole de l'UdeM.
Les étudiants ont d'ores et déjà annoncé qu'ils n'avaient pas l'intention de redistribuer le document incriminé, puisqu'ils sont convaincus que l'Université de Montréal se conformera à la nouvelle législation pour éviter d'être pénalisée financièrement par Québec.
De son côté, la direction de l'Université Laval, qui s'est placée dans une situation similaire en voulant accroître de 100$ par année ses frais afférents, sans toutefois obtenir l'appui des étudiants, n'a pas encore annoncé ses couleurs. La Conférence des recteurs et des principaux des universités du Québec (CRÉPUQ) a dénoncé l'ingérence de Québec dans la gouvernance des universités dès la publication du règlement.
Les frais afférents et les institutions montréalaises2006-2007 / 2010-2011
École Polytechnique: 415$ / 584$
Université de Montréal: 522$ / 622$
ETS: 343$ / 652$
UQAM: 368$ / 702$
HEC Montréal: 684$ / 849$
Université Concordia: 865$ / 930$
Université McGill: 1432$ / 1542$
Tiré de Cyberpresse, dim. 2 mars 08
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Corbo me console presque...
Nous habitons je ne sais quel creux de la Terre, et nous croyons habiter au plus haut; l'air, nous l'appelons ciel, comme si c'était à travers cet air, pris pour du ciel, que se meuvent les astres.