Ce qui est drôle dans l'article oscille entre l'humour et le consternant, selon moi. Qu'elle tienne un tel discours m'alarme, même. C'est le discours d'une classe extrêmement dominante et qui sait pouvoir se permettre des écarts, de l'abus. Cela traduit donc un état d'aisance pour la grande bourgeoisie (le grand patronat, si tu préfères), aisance non seulement monétaire (l'évidence) mais aussi idéologique et sociétale. Elle ne se sent pas menacée et sait que le prolétariat est écrasé et désuni, que les masses laborieuses sont loin de toute révolte. C'est l'abus d'une Marie-Antoinette qui demande son gâteau alors que le peuple crie famine.
Et il y aussi tout le discours qui est terriblement idiot. J'ai donné ma réaction mais j'aurais très bien pu répondre à chaque point que j'ai souligné plutôt.
Sans entrer dans d'importants débats philosophiques:
Il met l'ensemble des professions sur un pied d'égalité: le grand patron comme le petit employé savent ce que cela signifie, "une journée de boulot".
Es-tu d'accord avec elle que le grand patron, comme le petit employé, savent tous les deux,
également et en juste mesure, ce que représente une journée de boulot? C'est prétendre que le grand patron dans sa tour d'ivoire (lorsqu'il n'est directement sur un terrain de golf) sue autant à l'ouvrage que l'opérateur de presses mobiles? Dirais-tu que le PDG de Métro (27 millions de salaire par année) travaille autant qu'une infirmière qui fait 50 heures par semaine, souvent plus? Et qu'ils subissent le même stress, l'un confortablement assis dans un bureau ventilé, sur une chaise en cuir rembourrée à 12 000$, à papoter avec d'autres gestionnaires et l'autre à courir dans un hôpital pour sauver des vies et s'assurer que tous les malades sont traités également?
Ne trouves-tu pas révoltant de voir une telle affirmation être balancée par une ministre de "l'Économie"? Ne crois-tu pas qu'il s'agit là d'un parti pris évident pour le grand patronat? Savais-tu qu'avant, l'on parlait du Ministère du Travail et non de l'Économie?
Le temps, ça se gagne.
Sans entrer dans un débat philosophique (bis), crois-tu réellement que nous devons "gagner" le temps? C'est-à-dire "travailler" (puisque gagner = rémunération = travail) pour "mériter" notre "temps"? Ne crois-tu pas, plutôt, que le temps
est, que rien ne peut l'affecter en ce sens et qu'il appartient à tous un chacun de décider à quoi il veut employer son temps?
Ne trouves-tu pas cette affirmation volontairement autoritaire et un brin arrogante?
Car à la guerre, le plus fort soumet le plus faible, tandis que dans des rapports de travail, le plus fort communique de la force au plus faible.
Mais, et c'est là l'essentiel, personne n'y perd.
Les rapports de travail ressemblent justement à la guerre. Comme à la guerre, tu peux communiquer de ta force à tes alliés (tactiques en commun, entraide, apprentissages divers) et, comme à la guerre, le but du travail en milieu capitaliste est, en fait, de vaincre le plus faible. De prendre la place d'un autre (qui partira donc). Comme le disait un autre avant moi, le chômeur ne souhaite-t-il pas qu'un travailleur quelconque se blesse ou soit dans l'incapacité de pouvoir rentrer travailler pour pouvoir prendre sa place? Le patron d'une boîte ne souhaite-t-il pas que son concurent immédiat se plante dans ses investissements pour qu'il puisse avoir la main haute et basta si les trente employés d'en face perdent leur boulot? Ne souhaites-tu pas, lors d'une entrevue, que les autres interviewés soient lamentables, fassent une erreur quelconque pour que tu puisses le décrocher cet emploi? N'exploitons-nous pas outrageusement, depuis des siècles les ressources matérielles et humaines de milliards d'humains et de plusieurs continents dans le but de maintenir notre train de vie supérieur et la richesse d'une poignée? Le capitalisme, lui-même, ne se retrouve-t-il pas à être basé sur l'exploitation du faible par le fort?
. C'est pourquoi j'aimerais vous dire: assez pensé maintenant.
Ne trouves-tu pas une quelconque connotation fasciste à cette phrase? Ou très autoritaire et dangereuse? Une populace qui ne pense pas est une populace servile. Un peuple esclave. Quelle devient, alors, la différence entre un travailleur et une bête de somme? Les deux, s'ils ne pensent pas, sont dénués de toute pensée intelligente, après tout. Ils font le travail qui leur est assigné et, en retour, reçoivent une pitance qui leur permet de se nourrir. L'animal de somme n'a pas d'autre ambition, ensuite, que de dormir et de pouvoir se reproduire. Le consommateur-servile, lui, on l'occupe avec quelques divertissements qui viendront renforcer chez lui cette impression de "bonheur préfabriqué" et de "tout va bien", tout en assurant son côté "plaisir et divertissement", essentiel à l'Homme. Il dormira ensuite et se reproduira peut-être. Le consommateur-servile qui ne pense pas n'est qu'une bête de somme.