Holy freaking shit!
Du délire en
stream of consciousness...
Heureusement qu'ils sont là, ces braves gens qui montent au front pour que « nos enfants [puissent] manger du porc dans les écoles dans le futur » !
(En passant, je trouve qu'il est tout à fait sain [voire nécessaire] de tenir un débat de société sur la notion d'accommodement raisonnable accordé en fonction de motifs religieux.
Je pense qu'il importe d'abord de rappeler brièvement ce
qu'est l'accommodement raisonnable — l'expression a été utilisée si souvent de façon tellement inappropriée, ces derniers temps... Voici la définition de la Commission des droits de la personne:
Obligation juridique découlant du droit à l’égalité, applicable dans une situation de discrimination, et consistant à aménager une norme ou une pratique de portée universelle, en accordant un traitement différentiel à une personne qui, autrement, serait pénalisée par l’application d’une telle norme. Il n’y a pas d’obligation d’accommodement en cas de contrainte excessive.
[Mon soulignement.]
Je vais aussi citer les exemples que donne la Commission — ils sont simples et éclairants. Durant les élections, il existe une
règle générale qui dit qu'on doit se rendre seul dans l'isoloir. Or, cette prescription pénalise les personnes aveugles, qui se verraient privées d'assistance si la règle était appliquée de façon rigide [de façon
égalitaire, si vous voulez]. La loi elle-même a donc prévu un cas d'exception [le
traitement différentiel, l'accommodement raisonnable] pour permettre à ces personnes handicapées d'exercer leur droit de vote.
Dans un contexte religieux, l'accomodement raisonnable pourrait être invoqué dans le cas où une jeune mulsumane convaincue de la nécessité de porter le hidjab [la notion d'authenticité — assez floue, on s'entend, mais bon... — est plutôt importante dans l'évaluation des cas religieux] se verrait empêchée de porter ce vêtement en vertu d'un règlement de l'école interdisant les couvre-chefs [la
règle générale].
Personnellement, j'ai d'importantes réserves sur certains accomodements raisonnables qui ont été « octroyés » par les tribunaux dans le passé. Mon principal malaise réside dans le fait que, selon moi, la liberté de religion a maintes fois bénéficié d'un traitement [accommodant] disproportionné — d'un traitement préférentiel — qui, dans certains cas, a fait en sorte qu'il y a eu empiétement sur les
autres droits et libertés protégés par la Charte [la liberté d'association, en particulier, me semble avoir été particulièrement mal servie par les tribunaux]. Faut par ailleurs réaliser que la situation est en flux; je crois que, dans les dernières années, les tribunaux ont fait montre d'un peu plus de prudence dans l'octroi de tels accommodements.
Toutefois, au-delà du questionnement du genre « faudrait se poser la question à savoir si la liberté de religion fait l'objet d'un traitement privilégié », je n'ai pas vraiment de recommandation normative à émettre sur le sujet.
Maintenant. Si l'on remet en question
le mécanisme même de l'accommodement raisonnable [comme semblent le faire les élus hérouxvillois], il faut être prêt à aborder les difficiles questions que cela suppose. Souhaite-t-on carrément se départir de cette notion « d'accommodement raisonnable » ? C'est évidemment impensable, si aucune mesure de remplacement n'est proposée — comment dealera-t-on avec toutes les situations où les règles générales discriminent certains individus et les privent de droits et libertés inscrits dans la Charte? On « l'élimine » seulement pour les cas religieux, l'accommodement raisonnable? On fait quoi, alors, avec la liberté de religion inscrite dans la Charte? On l'enlève? On la modifie comment, la Constitution? Vaste programme...
De plus, je crois qu'il est important de garder à l'esprit, à travers toute cette réflexion, qu'il est impossible de codifier chaque situation potentielle à travers la législation — chaque cas a ses spécificités, sa dose de complexité. L'accommodement raisonnable, c'est éminemment une approche « cas par cas ». Une telle façon de procéder me paraît inévitable [et normale].
Je reviens maintenant au début de mon message et au discours délirant des élus d'Hérouxville. Je disais que le débat me paraissait sain, nécessaire, etc. etc.
Une condition, toutefois, est requise pour que le débat se fasse d'une façon minimalement fructueuse: il faut que les participants respirent par le nez! Cela implique notamment qu'ils s'abstiennent, si possible, de déverser à un rythme alarmant circonlocutions « logiques » sans queue ni tête, cris d'alarme apocalyptiques et autres déclarations absurdement péremptoires.)
"Things are more like they are now than they ever were before." (Dwight Eisenhower)