de Etienne S le Mar Avr 18, 2006 9:13 pm
La féminisation de la langue, c'est important, même si la rectitude politique en fait chier plusieurs. Plus qu'une question de respect et de morale, les transformations du langage permettent réellement des changements sociaux.
Pour expliquer tout cela, on peut se référer à Saussure, fondateur de la linguistique moderne. Un des principes théoriques qu'il avance est la «théorie du signe», qui veux qu'il y ait association par l'esprit d'un signifiant (image mentale, visuelle ou acoustique d'un mot) et d'un signifié (concept, c'est-à-dire représentation mentale d'une chose).
Ainsi, puisque nous pensons en fonction de notre système de penser (c'est-à-dire notre langue), les mots dont nous disposons pour représenté une idée intègre tout un arbitraire et ne sont pas innocent. On peut penser au noir qui représente le mal dans les sociétés occidentales et le blanc qui représente symboliquement la pureté. Lorsqu'on nomme une personne d'origine africaine «un noir», il y a toute une symbolique dans la représentation que nous nous en faisons.
Il en est de même lorsqu'on ne féminise pas. Le fait qu'on parle des droits de l'Homme n'est pas innocent. Parle-t-on réellement des êtres humains en général, ou prime-t-il dans notre esprit la représentation d'un humain de sexe mâle? Le fait que plusieurs fonction professionnel n'ait pas été historiquement féminisée n'est pas non plus innocent.
Au Québec, on est plutôt avancé sur ce plan, mais ailleurs, en France par exemple, il n'est pas rare qu'on entende madame le juge ou madame le professeur. Le fait qu'une langue ne permette pas à certaines sociétés de nommer un élément (une femme professeur) favorise la résistance à l'existence même de cet élément. Si le masculin l'emporte dans un système de pensé fondamental, cela favorise la domination réelle, parce qu'oriente la manière de penser.
Étienne Simard
« Flatter le peuple, c’est commettre un crime !» - Flora Tristan