Les private equities

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Les private equities

Messagede BenoitL le Ven Nov 09, 2007 10:20 pm

Voracité

Tandis que, contre l’horreur économique, le discours critique – qu’on appela un temps altermondialiste – s’embrouille et devient soudain inaudible, un nouveau capitalisme s’installe, encore plus brutal et conquérant. C’est celui d’une catégorie nouvelle de fonds vautours, les private equities, des fonds d’investissement à l’appétit d’ogre disposant de capitaux colossaux (1).

Les noms de ces titans – The Carlyle Group, Kohlberg Kravis Roberts & Co (KKR), The Blackstone Group, Colony Capital, Apollo Management, Starwood Capital Group, Texas Pacific Group, Wendel, Eurazeo, etc. – demeurent peu connus du grand public. Et, à l’abri de cette discrétion, ils sont en train de s’emparer de l’économie mondiale. En quatre ans, de 2002 à 2006, le montant des capitaux levés par ces fonds d’investissement, qui collectent l’argent des banques, des assurances, des fonds de pension et les avoirs de richissimes particuliers, est passé de 94 milliards d’euros à 358 milliards ! Leur puissance de feu financière est phénoménale, elle dépasse les 1 100 milliards d’euros ! Rien ne leur résiste. L’an dernier, aux Etats-Unis, les principaux private equities ont investi quelque 290 milliards d’euros dans des rachats d’entreprises, et plus de 220 milliards au cours du seul premier semestre 2007, prenant ainsi le contrôle de huit mille sociétés... Déjà, un salarié américain sur quatre – et près d’un salarié français sur douze – travaille pour ces mastodontes (2).

La France est d’ailleurs devenue, après le Royaume-Uni et les Etats-Unis, leur première cible. L’an dernier, ils y ont fait main basse sur quatre cents entreprises (pour un montant de 10 milliards d’euros), et ils en gèrent désormais plus de mille six cents. Des marques fort connues – Picard, Dim, les restaurants Quick, Buffalo Grill, les Pages jaunes, Allociné ou Afflelou – se retrouvent sous le contrôle de private equities, le plus souvent anglo-saxons, qui lorgnent maintenant sur des géants du CAC 40.

Le phénomène de ces fonds rapaces est apparu il y a une quinzaine d’années mais, dopé par un crédit bon marché et à la faveur de la création d’instruments financiers de plus en plus sophistiqués, il a pris ces derniers temps une ampleur préoccupante. Car le principe est simple : un club d’investisseurs fortunés décident de racheter des entreprises qu’ils gèrent ensuite de façon privée, loin de la Bourse et de ses règles contraignantes, et sans avoir à rendre compte à des actionnaires pointilleux (3). L’idée, c’est de contourner les principes mêmes de l’éthique du capitalisme en ne pariant que sur les lois de la jungle.

Concrètement, nous expliquent deux spécialistes, les choses se passent ainsi : « Pour acquérir une société qui vaut 100, le fonds met 30 de sa poche (il s’agit d’un pourcentage moyen) et emprunte 70 aux banques, en profitant des taux d’intérêt très faibles du moment. Pendant trois ou quatre ans, il va réorganiser l’entreprise avec le management en place, rationaliser la production, développer des activités et capter tout ou partie des profits pour payer les intérêts... de sa propre dette. A la suite de quoi, il revendra la société 200, souvent à un autre fonds qui fera la même chose. Une fois remboursés les 70 empruntés, il lui restera 130 en poche, pour une mise initiale de 30, soit plus de 300 % de taux de retour sur investissement en quatre ans. Qui dit mieux (4) ? »

Alors qu’ils gagnent personnellement des fortunes démentielles, les dirigeants de ces fonds pratiquent désormais, sans états d’âme, les quatre grands principes de la « rationalisation » des entreprises : réduire l’emploi, comprimer les salaires, augmenter les cadences et délocaliser. Encouragés en cela par les autorités publiques, lesquelles, comme en France aujourd’hui, rêvent de « moderniser » l’appareil de production. Et au grand dam des syndicats, qui crient au cauchemar et dénoncent la fin du contrat social.

Certains pensaient qu’avec la globalisation le capitalisme était enfin repu. On voit maintenant que sa voracité semble sans limites. Jusqu’à quand ?

Ignacio Ramonet

(1) Lire Frédéric Lordon, « Quand la finance prend le monde en otage », Le Monde diplomatique, septembre 2007.

(2) Lire Sandrine Trouvelot et Philippe Eliakim, « Les fonds d’investissement, nouveaux maîtres du capitalisme mondial », Capital, Paris, juillet 2007.

(3) Lire Philippe Boulet-Gercourt, « Le retour des rapaces », Le Nouvel Observateur, Paris, 19 juillet 2007.

(4) Cf. Capital, op. cit.

http://www.monde-diplomatique.fr/2007/11/RAMONET/15295

Voilà l'état actuel du capitalisme mondial.
La dialectique peut-elle casser des briques?
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Messagede Jean-Francois Barbeau le Ven Nov 09, 2007 10:57 pm

Ce mois si, dans le MD il y a aussi de très bons articles sur la situation politique en equateur et au kurdistan irakien. Et un très interessant sur l'OMC qui merite d'être lu
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Messagede François-ASSÉ le Sam Nov 10, 2007 3:32 am

J'ai effacé un post de Panurge et la réponse de Jean-Francois le concernant. Panurge n'a pas lancé d'insulte, mais son intervention semblait vouloir dévier le sujet, J-F lui a répondu, voilà.
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Messagede Panurge le Sam Nov 10, 2007 5:27 pm

François-ASSÉ a écrit: Panurge n'a pas lancé d'insulte, mais son intervention semblait vouloir dévier le sujet,


C'est faux. Je n'ai fait que dire que je n'y voyais pas de problème.
Vraiment, fais gaffe à l'abus.
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Messagede démon_néolibéral le Jeu Nov 15, 2007 12:11 am

Je suis d'accord avec panurge, so what si ils achètent d'autres entreprises pour les rendre productives? Pourquoi se contenter de la médiocrité quand on peut faire plus avec moins?
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Messagede Moïse le Jeu Nov 15, 2007 1:44 am

démon_néolibéral a écrit:Je suis d'accord avec panurge, so what si ils achètent d'autres entreprises pour les rendre productives? Pourquoi se contenter de la médiocrité quand on peut faire plus avec moins?


Faire plus avec moins... Tu veux dire faire plus de profits pour quelques propriétaires/gestionnaires de fonds avec moins d'employés moins payés dans de moins bonnes conditions ?

Bien sûr, c'est logique ! Pourquoi se contenter de la médiocrité alors qu'on peut s'enrichir en appauvrissant une partie de la planète ?
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Messagede démon_néolibéral le Jeu Nov 15, 2007 5:22 pm

C'Est pas exactement ce que je voulais dire mais tu semble commencer à comprendre le concept. L'argent qui est pas utilisé pour surpayer quelques employés est utilisé pour réinvestir ailleur. Les private equities font exactement la même job que la CDP et la SGF mais de façon beaucoup plus efficace parce qu'ils appartiennent à des intérêts orivés et que le privé ne tolère pas de rendements médiocres, contrement au public.
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La thérapie de chocs

Messagede Carbo le Jeu Nov 15, 2007 5:28 pm

Évidemment, le privé serait automatiquement plus efficace que le public. Sors de tes livres de gestion et tu découvrira un monde d'exemples concrets qui infirment ce que tu viens de dire.

La privatisation coûte plus cher que la socialisation pour les usagers... Lis un peu sur l'Argentine, c'est un cas d'école en la matière!!!
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Messagede démon_néolibéral le Jeu Nov 15, 2007 5:44 pm

C'est certain qu'un cas ou la corruption est complètement hors-normes peut être appliqué et donné en exemple. Si tu veux, je peux te donner plusieurs exemples du contraire. Va voir l'amélioration de la situation en Géorgie, pas celle aux États-Unis, l'ancienne RSS-Géorgie après qu'elle ai suivi les recommendation de la banque mondiale et du FMI, même choses pour les pays baltes, pour ne citer que ceux là.
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Messagede Moïse le Jeu Nov 15, 2007 5:50 pm

Parlant de la Géorgie... Pas de lien direct avec les private equities, mais bon.

http://www.dailymotion.com/video/x3gnbb_georgian-police-vs-rioters_extreme
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Messagede démon_néolibéral le Jeu Nov 15, 2007 6:03 pm

C'est vrai que c'est dommage ce qui se passe en géorgie en ce moment. Je ne dit pas qu'ils sont parfait mais qu'ils s'améliorent. Aux dernières nouvelles que j'ai eu, le périmètre de sécurité était réduit au terrain du parlement.
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Messagede démon_néolibéral le Jeu Nov 15, 2007 6:09 pm

As of 2001 54% of the population lived below the national poverty line but by 2006 poverty decreased to 34%.


Si c'est pas une belle amélioration tout ça...



The World Bank dubbed Georgia "the number one economic reformer in the world" because it has in one year improved from rank 112th to 18th in terms of ease of doing business



Ce doit être une coïncidence.

allez voir ça aussi: http://rru.worldbank.org/businessplanet ... 0amp;cid=0


http://en.wikipedia.org/wiki/Georgia_%28country%29
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Messagede Carbo le Jeu Nov 15, 2007 8:02 pm

Tiens, tiens. C'est drôle, c'était le titre que portait justement l'Argentine avant le "crash" de 2001-2002... Peut-être que la Géorgie sera la première prochaine "meilleure élève du FMI" et de la BM!!!
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Messagede démon_néolibéral le Jeu Nov 15, 2007 8:04 pm

Le problème majeur de l'argentine tenait en deux concepts, corruption et inflation, c'est le genre de choses qui arrivent quand tu paie tes pots-de-vin en imprimant de la monnaie.
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Messagede Carbo le Jeu Nov 15, 2007 8:14 pm

Désolé mais tu n'as manifestement pas lu sur le sujet. Les principaux problèmes étaient la privatisation et la dérégulation. En d'autres mots, ils étaient liés par un Currency Board, une caisse d'émission en français. Ils étaient à parité avec le dollar U$ en d'autres mots et ils ne pouvaient pas jouer sur leur monnaie en dépit des événements économiques pressants...

Et finalement les banques ont envoyé l'argent à la maison-mère à Washington. Les gens ne pouvaient plus retirer de l'argent de leur compte qu'au compte-goutte!
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